Accueil » Smart mag » L’IA, génératrice d’avenir pour l’officine ?
Hier encore, son appel intriguait et charmait comme celui des sirènes. Mais une fois les mirages dissipés et la communication établie, l’intelligence artificielle (IA) a bel et bien embarqué sur le navire-officine. En 2025, le pharmacien, en capitaine avisé, apprend progressivement à compter sur ce discret second, mélange de boussole et de muse, l’aidant à se diriger et lui inspirant des voies de performance inédites. De la gestion des stocks à la sécurisation de la dispensation, où et comment employer cet étonnant compagnon ?
Substitution, nouvelles missions, expérimentations… le pharmacien d’officine a l’habitude d’aborder de nouveaux rivages. Il a d’ailleurs fait partie des premiers professionnels de santé à s’informatiser. C’est donc naturellement que l’officine vint à l’IA, dans le sillon d’usages numériques déjà bien implantés. Les logiciels de gestion d’officine (LGO) se voient depuis quelques années « augmentés » de modules intelligents. Certains assistent par exemple les équipes officinales lors de la dispensation en détectant les erreurs ou les risques d’interactions. D’autres dégagent le pharmacien de la tâche fastidieuse de la retranscription, lui permettant de focaliser son attention sur le patient au cours des entretiens pharmaceutiques. Les capacités de calcul et de prédiction de l’IA viennent également étayer la gestion des stocks, aident à prévoir les réassorts en tenant compte d’une foule de paramètres (saisons, météo, épidémies, ruptures…), ou permettent d’affiner les opérations commerciales. Enfin, l’analyse fine des données, notamment biologiques et génomiques, ouvre grand la voie à d’immenses progrès à venir en matière de personnalisation des soins, du diagnostic et de la prévention.
Pour comprendre les bonds de géants d’aujourd’hui, il est intéressant de revenir aux premiers pas. L’entité dénommée « IA » recouvre un ensemble de techniques qui permettent à des machines d’effectuer des tâches cognitives en principe dévolues aux humains. L’origine en remonte au début des années 1950 et aux travaux des mathématiciens Alan Turing et Marvin Minsky sur la simulation des capacités neuronales. Les systèmes experts, formes d’IA non évolutives et limitées à des tâches précises, ont commencé dans les années 1980 à trouver diverses applications dans l’industrie. Mais le saut quantique a lieu fin 2022, avec le lancement de l’agent conversationnel ChatGPT par OpenAI. Ce modèle de langage utilisant l’apprentissage profond (un sous-domaine de l’IA) est capable de générer des réponses mises en contexte et argumentées à des questions posées en langage naturel. À présent, on voit se multiplier les avatars de cette « IA générative », produisant sur demande du texte, des images, des vidéos…
Si stupéfiants soient-ils, les usages actuels relèvent toutefois encore de l’IA « faible » ou « étroite », c’est-à-dire surpassant les capacités humaines dans des domaines donnés mais ayant toujours besoin des humains pour se former. Cette IA « faible » est à différencier des (encore) hypothétiques IA « forte » et « super IA », qui deviendraient auto-apprenantes et autonomes. Pour l’heure, nous n’y sommes pas : l’IA a besoin de l’humain et l’humain trouve de plus en plus d’utilité à l’IA.
La santé, royaume par excellence de la complexité, est l’un de ses domaines de prédilection. Les multiples applications de l’IA à la santé humaine seraient trop longues à énumérer. Elles couvrent toute la chaîne de valeur, de la découverte des médicaments (identification de cibles thérapeutiques) à la personnalisation des soins et à l’amélioration de l’observance, en passant par la création de « jumeaux numériques » pour faciliter les essais cliniques ou préparer des interventions chirurgicales. Sans oublier toutes les modalités de l’aide à la décision (diagnostic, prescription, dispensation, interventions préventives, etc.). Dans certains domaines, comme le diagnostic basé sur des images, elle a déjà démontré sa supériorité par rapport au médecin seul. Pour détecter un mélanome, l’IA est ainsi à même de brasser et comparer des millions de clichés à la vitesse de l’éclair, prouesse inégalable par un dermatologue. L’annonce du diagnostic, le choix d’une stratégie thérapeutique et son explication au patient, requièrent en revanche des facultés qui font défaut à la machine (prise en compte de la personne dans sa globalité, pédagogie, intuition…), et sur lesquelles le médecin peut concentrer son expertise. Transposé dans le monde de l’officine, l’IA saura par exemple comparer 10 000 études cliniques en une minute, tandis que le pharmacien se souviendra, lui, que M. Martin n’a pas bien toléré le dernier traitement ou n’aime pas les formes buvables.
En officine, l’IA est un « superpouvoir », en mesure d’outiller le pharmacien à la fois dans sa pratique clinique, mais également en tant que gestionnaire. Autrement dit : l’IA n’est pas là pour le remplacer mais pour « augmenter » sa valeur ajoutée, son conseil, sa rentabilité… Quelques exemples ?
L’IA, en front-office, se présente comme un compagnon de l’expertise officinale, pour notamment :
L’IA, en back-office, fait gagner du temps et de l’efficacité dans la conduite d’actions répétitives et/ou chronophages, en aidant à :
À l’avenir, l’utilisation de données massives et actionnables permettra un pilotage de plus en plus fin, non seulement du fonctionnement de l’officine mais également des parcours de santé. L’histoire ne fait que commencer… En serez-vous ?